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Les Chroniques du Cercle Noir
30 mai 2011

Gish

 

Smashing Pumpkins

Gish

 

 

Gish

 Tracklist

I am one (Corgan/Iha)

Siva (Corgan)

Rhinoceros (Corgan)

Bury Me (Corgan)

Crush (Corgan)

Suffer (Corgan)

Snail (Corgan)

Tristessa (Corgan)

Window Paine (Corgan)

10° Daydream (Corgan)

Produit par Butch Vig et Billy Corgan

1991

 

            C'est le premier album du groupe de Chicago, produit par Butch Vig (également producteur du fameux Nevermind de Nirvana), et entièrement écrit par Billy Corgan, à l'exception d'un titre écrit en collaboration avec James Iha. Pour cet album, le groupe est composé de Billy Corgan (chant, guitare), James Iha (guitare), d'Arcy (basse, chant) et Jimmy Chamberlin (batterie, percussions) même si la rumeur veut que Billy Corgan ait lui même enregistré l'intégralité des parties de guitare et de basse. Le nom de l'album est un hommage à Lillian Gish, actrice américaine de cinéma muet.

            J'écoutais déjà les Smashing Pumpkins depuis un certain temps quand j'ai découvert cet album, l'oreille que j'y ai portée n'a donc jamais été celle d'un ingénu, enthousiaste à l'idée d'avoir découvert avant tout le monde la nouvelle sensation rock'n roll mais plutôt celle du fan trop exigeant. D'ailleurs peut-être n'aurais-je jamais entendu Gish s'il avait été le seul album du groupe. Le seul morceau que je connaissais était Siva, car très souvent jouée en concert. Et donc, je pense que je l'ai longtemps comparé aux autres albums du groupe, alors que Gish est bien sûr l'album fondateur de la musique des Pumpkins. Je l'ai écouté de manière distraite, avec condescendance, ne m'attardant que sur les chansons les plus évidentes de l'album, et le laissant peu à peu s'empoussiérer sur mon étagère de cd. Pis bon, ils auraient pu lui choisir une jolie couverture à ce premier album. Et un jour, probablement un dimanche après-midi pluvieux, je l'ai réécouté avec attention et je l'ai entendu autrement que durant mon adolescence irrévérencieuse. Car s'il est un album qui mérite une écoute approfondie, intense, avec le casque sur les oreilles, à 2h du matin dans le noir, c'est Gish.

            Une chose est sûre, c'est l'album le moins accessible des Smashing Pumpkins, le moins pop, le moins mélodique, mais on y trouve la plupart des éléments caractéristiques du groupe. Aucun tube en puissance, aucun air à siffloter dans les couloirs... (à l'exception de Rhinoceros, morceau le plus conventionnel de l'album). Pour  apprécier Gish, il faut avoir du temps devant soi !

            Les Smashing Pumpkins sont un groupe de guitares. Plus que des chansons, les titres sont des enchaînements de riffs de guitare, des superpositions d'accords et des mélanges de leads et d'arpèges, un peu à l'image de certains morceaux de Led Zeppelin. C'est cette surabondance de riffs et donc ces compositions très riches qui font de Gish un album difficile d'accès. La musique du groupe est très ambitieuse, hors de question de suivre la formule traditionnelle couplet-refrain, et chaque chanson regorge d'idées et d'expérimentations. Le style est assez inclassable car les influences sont très nombreuses, et la plupart des morceaux possède plusieurs ambiances très contrastées. Toutefois, la puissance des guitares, la recherche d'un son lourd et saturé et la multiplication des solos de guitare, parfois un peu démonstratifs, renvoient aux groupes de hard-metal des années 70-80 (Black Sabbath, Boston, Iron Maiden, Metallica...). Les morceaux les plus puissants de l'album (I am one, Siva, Bury Me, Tristessa) se basent sur des riffs largement hérités de cette période. Une autre grande influence est Jimi Hendrix dans la manière de privilégier l'énergie et la sonorité à la mélodie, en particulier pour les solos de guitare (par exemple le solo de Window Paine). Certaines parties de guitare sont particulièrement inspirées : l'introduction de Siva, la fin de Bury me, l'arpège hypnotique de Snail... et d'autres beaucoup moins ! L'importante quantité d'idées fait que l'album souffre un peu de redites : était-il judicieux de proposer à la fois Siva et Tristessa ou I am one et Bury me? Certains passages auraient mérité d'être un peu plus exploités plutôt que de laisser place à une nouvelle partie (le magnifique pont "Too late to discover..." de Suffer, ou encore le passage jazzy de Siva "Sprinkle all my kisses on your head...").

            Gish présente aussi une très forte influence du rock psychédélique des années 60-70 comme Pink Floyd et en particulier les Doors comme dans Suffer et Window Paine, deux morceaux très sombres qui rappellent The End ou When the Music's Over. D'ailleurs, le groupe puisera largement dans l'imagerie psychédélique pour les deux clips vidéos tirés de Gish (Rhinoceros et Siva). Cet héritage du psychédélisme se retrouve aussi dans certaines paroles ("Flower, taste the the sunshine" - Snail) et dans la plupart des titres, plutôt mystérieux, des chansons.

            La dernière influence majeure que je retrouve dans cet album est celle de The Cure (période Pornography). Celle-ci se fait plus ressentir dans la construction de certaines chansons, c'est à dire une mise en place très longue du morceau pour arriver au chant. Le début d'I am one en est l'exemple parfait : une introduction basse-batterie, puis arrivée des guitares qui jouent à leur tour un arpège d'introduction, puis thème principal du morceau et enfin le chant commence. Certains effets de guitare utilisés (chorus, flanger...) et certaines mélodies jouées rappellent aussi The Cure, par le côté atmosphérique qu'ils confèrent au morceau (Rhinoceros, Crush).

            Hormis l'omniprésence des guitares, l'essence même des Smashing Pumpkins, le groupe possède en la personne de Jimmy Chamberlin un batteur hors pair au jeu subtil, puissant et énergique qui constitue l'une des réelles particularités de Gish. Batteur de jazz de formation, Chamberlin ne conçoit pas la batterie comme instrument d'accompagnement mais plutôt comme soliste, ce qui rend ses parties de batterie très intéressantes à décortiquer. Snail et Window Paine sont aussi pour lui l'occasion de faire preuve de l'étendue de ses capacités techniques.

            La batterie est soutenue par une basse solide et sobre, un peu à l'image du jeu de Kim Deal des Pixies, qui vient très bien compléter le jeu ultra-dynamique de Chamberlin. Dans les Pumpkins, la basse est le socle sur lequel s'appuient les autres instruments et grâce auquel ils peuvent se laisser aller à toutes les fantaisies, en particulier sur Gish. Bury me, Crush et I am one sont avant tout portées par des lignes de basse sobres, ultra régulières et efficaces.

            Et puis, fatigué des guitares, le groupe a eu la très bonne idée d'utiliser d'autres instruments : un solo de flûte aux accents orientaux dans Suffer et des nappes de violons sur Daydream, qui permettent d'apporter un nouveau souffle à l'instrumentation de ces morceaux. Un peu à la manière des expérimentations des Beatles (pour ne citer que les plus connus).

            Dans ce déluge de riffs de guitares et de breaks de batteries, la voix nasillarde et si particulière de Billy Corgan ne devient qu'un simple complément et est utilisée comme un instrument. Les morceaux ne sont pas du tout composés autour de la mélodie du chant, à l'exception de Daydream, morceau le plus pop de Gish, chanté par d'Arcy et qui annonce étrangement la musique des Cranberries, apparus quelques années plus tard. L'utilisation des choeurs homme-femme est particulièrement réussie et aurait mérité d'être plus largement exploitée (Siva, Bury Me, Rhinoceros...).

           

            De manière globale, Gish se rapproche beaucoup des albums de Jane's Addiction de l'époque, groupe pour lequel les Smashing Pumpkins ont assuré la 1ere partie à la fin des années 80, par cette accumulation d'influences à la fois hard, psychédélique, new wave et pop, et cette expérimentation constante, principalement au niveau des guitares. Les 2 groupes ne sont évidemment pas identiques mais je trouve leur démarche assez similaire. Bien qu'il ait fêté son 20e anniversaire il y a quelques jours, le son de Gish a assez bien vieilli (contrairement au Ten de Pearl Jam par exemple). Le son de batterie est resté très dynamique et les guitares et la basse ne sont pas trop marqués par l'époque. Peut être que la sortie remasterisée de l'album prévue pour l'automne 2011 révèlera Gish sous un jour totalement nouveau, mais on peut douter de l'intérêt artistique de ce projet et je soupçonne que sa raison d'être soit avant tout commerciale...

            Les points forts de l'album sont bien sûr la grande profusion d'idées, les nombreuses expérimentations guitaristiques, la combinaison batterie jazz-guitares métal, et le fait que cette musique soit finalement assez inclassable. L'ordre dans lequel sont proposées les chansons, point rarement abordé mais fondamental, est très judicieux, en particulier les enchaînements Rhinoceros-Bury me, Suffer-Snail ou Window Paine-Daydream... et j'aime beaucoup la chanson cachée, sorte de version glauque de Daydream. Ce bon choix dans l'ordre des chansons évite que les redites ne soient trop apparentes. Car, comme évoqué précédemment, les redites représentent bel et bien l'un des points faibles de l'album, l'autre faiblesse de l'album est le manque de naturel et de spontanéité de certaines compositions, car parfois beaucoup trop alambiquées. Snail, Siva, I am one auraient sûrement gagné à être simplifiées.

Enfin, quelques chansons me semblent un peu faibles (Crush, Snail, Tristessa...) en comparaison avec les authentiques réussites que sont Bury me, Window Paine ou Suffer.

 

            Un petit 7/10, en attendant la suite... Et vous, qu'en pensez-vous ?

a 2 chasages

 

 

           

a 2 chasages

 

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